Numéro spécial Champ Pénal / Penal Field //
C’est avec grand plaisir que je partage cet appel à contributions pour un numéro spécial de la revue Champ pénal / Penal field, consacré aux réformes des systèmes pénitentiaires en Afrique.
Ce dossier, que je coordonne avec Bénédicte Fischer, entend proposer une analyse approfondie, plurielle et interdisciplinaire de ce qui se dévoile derrière les « échecs » des réformes pénales et pénitentiaires. Plutôt qu’un simple état des lieux, il entend mettre en lumière la complexité des dynamiques en jeu à travers l’étude des interactions entre des acteurs considérés dans leur pluralité – bailleurs internationaux, ONG, institutions politiques nationales et locales, acteurs engagés en prison et personnes détenues.
Ce dossier s’articule autour de deux axes principaux :
Axe 1. Pour une relecture critique des « échecs » des réformes pénitentiaires
Loin de constituer de simples « échecs » techniques ou organisationnels, les limites des réformes pénales et pénitentiaires en Afrique révèlent des dynamiques structurelles profondes. Elles témoignent du poids des héritages coloniaux, de la place du politique en prison, de l’influence persistante de modèles normatifs standardisés et de la reproduction d’un certain équilibre institutionnel. Dépassant un constat « d’échec » illustré par la faible matérialité des réformes, ce premier axe propose d’interroger les discours qui l’alimentent et les effets qu’il produit sur les différents acteurs et politiques. S’inscrivant dans la continuité de travaux menés sur le continent africain (Darbon, 1997 ; Faye, 2017 ; Olivier de Sardan, 2021), ce dossier examine les « écarts » entre les modèles théoriques et les réalités sociales dans le domaine pénal et pénitentiaire, sans pour autant appeler à les combler. Dans cette perspective, il plaide pour l’adoption d’une grille de lecture non normative et une relecture critique des « échecs » de ces réformes (Morelle et al., 2018 ; Bernard, 2022).
Axe 2. Vers une refondation des cadres d’analyse des réformes pénitentiaires
Ces « échecs » ne peuvent pas se comprendre uniquement en raison de l’extranéité ou de l’inadaptation des modèles (Bayart, 1999 ; Darbon, 1997 ; Olivier de Sardan, 2021) ; ils révèlent avant tout les rapports de pouvoir qui structurent les équilibres institutionnels des États africains. Poursuivant les travaux ayant souligné les approches essentiellement managériales des transferts de modèles sans prise en compte de la philosophie des réformes (Massicard, 2002 ; Bouagga, 2019 ; Édouard & Dandoy, 2021), il s’agit de montrer la primauté des enjeux sécuritaires, les rapports de pouvoir entre les acteurs, l’instrumentalisation politique de la prison, les ressources tirées de ces écarts, ou encore les héritages coloniaux des systèmes de justice contemporains.
L’objectif de cet axe est ainsi de révéler les dynamiques normatives et institutionnelles concrètement à l’œuvre, au-delà du constat facile et inhibant d’échec. Plutôt que penser ces réformes en termes de réajustement d’un système de justice considéré uniquement comme dysfonctionnel, il s’agit de concourir à revisiter ou même réinventer les grilles d’analyse de ces réformes en réinterrogeant les fondations même du cadre juridico-administratif dans lesquelles elles prennent place (Fischer, 2021 ; Bernard, 2022). Le choix et l’application d’un système pénal ne sont en effet jamais neutres : ils reflètent les décisions politiques d’un État et les valeurs d’une société. Réformer la justice pénale en Afrique implique ainsi non seulement de repenser les structures, mais aussi des modèles d’État qui les soutiennent.
📅 Date limite d’envoi des articles : 10 août 2025
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